BOOKHOUSE BOY #41 / Frédérick Houdaer, poète & romancier

Je ne me risquerai jamais à dire du mal de Frédérick Houdaer.

D’abord parce qu’au quotidien, l’animal tend rarement le bâton pour se faire battre. Ensuite, parce que Frédérick Houdaer a des pouvoirs magiques. Si vous lui demandez, il niera en bloc. Il détournera la conversation — comme il sait si bien le faire —, éludera la question. Ce qu’il ne peut nier en revanche, c’est qu’il a écrit un livre de poésie sur le sujet. Fire Notice, paru au Pont du Change. J’ai des preuves : je l’ai lu. Ça s’ouvre même sur une citation de Robert Plant : « Oui, la magie m’intéresse. Point ». De là à penser que c’est une façon de passer aux aveux…

A cela vous répondrez : okay l’ami, mais ça n’en fait pas pour autant un authentique sorcier. Et vous aurez raison. Finalement, Frédérick Houdaer est à mes yeux moins un sorcier qu’un ange de l’annonciation. Si vous lui demandez, il le niera en bloc. Il détournera la conversation — comme il sait si bien le faire —, éludera la question. Ce qu’il ne peut nier en revanche, c’est qu’il y a quasiment un an jour pour jour, ma bonne amie et moi étions avec lui à la pizzeria Carlino — le restaurant de tous les dangers, c’est un peu notre black lodge à nous, lyonnais  — et qu’il s’est passé un phénomène tout à fait étrange. Frédérick Magick Houdaer nous a entretenu le plus sérieusement du monde et durant une bonne dizaine de minutes du fait d’avoir des enfants.

Le lendemain, secoués, nous faisions un test de grossesse.

Et il était positif.

Devant une telle démonstration de puissance, j’ai très vite proposé à Frédérick d’écrire un petit essai sur le livre de son choix pour notre future collection Les Feux Follets afin de m’assurer qu’il n’arrive rien à ma famille nouvellement élargie. Juste au cas où. On ne sait jamais. Vous savez ce qu’on dit. Un maléfice sur huit générations est si vite arrivé.

| On trouve quoi comme nouvelles acquisitions dans ta bibliothèque ?

Jugan de Jérôme Leroy, roman noir publié à la Table Ronde. Le tome 2 de la correspondance Chardonne-Morand (chez Gallimuche). La correspondance de Nicolas de Staël publiée au Bruit du temps.

| Quel livre marquant as-tu découvert à l’adolescence et que tu possèdes toujours ?

Last exit to Brooklyn de Selby dans une vieille édition de poche, avec une couv’ hideuse à souhait. Du Djian publié par Bernard Barrault. Pas mal de littérature américaine en 10/18 (Brautigan, Fante, L.Cohen).

| Sans égard pour sa qualité, lequel de tes livres possède la plus grande valeur sentimentale, et pourquoi ?

En passant ma bibliothèque à la loupe… Il y a ce gros livre jaune, publié par First Editions (quel nom, c’est autre chose que Le Feu Sacré !), intitulé Le Vin pour les Nuls. Je suppose que le jour où mon père me l’a offert, il essayait de me dire quelque chose.

| Tu prêterais lequel de tes livres à quelqu'un que tu voudrais séduire ?

Mon intégrale « Pierre Bellemare » ! Pour la stocker, j’ai réservé une pièce spéciale dans mon F.15. Mais pour séduire, je compte également sur mon F.15 !

| Que trouve-t-on comme livres “honteux” dans tes rayonnages ?

Beaucoup de livres « honteux » chez moi. Des bios d’Anton LaVey (quel forain, celui-là !), de Ron Hubbard (par Russell Miller, ancien adepte de la Sciento’ ayant déniché des documents à charge hallucinants), de Crowley…

| Quels livres as-tu hérité de tes proches ?

De nombreux — et remarquables — ouvrages sur le zen et le taoïsme grâce au cousin de ma mère (disciple en son temps de Taïsen Deshimaru).

| Le livre que tu as le plus lu et relu ?

Moby Dick, Demande à la poussière, Feuilles d’herbe, Le Gai Savoir & le Zarathoustra de Tonton Friedrich… Homère également, relu dans mille et une traductions (français & anglais).

| Le livre qui suscite en toi des envies d'autodafé ?

Aucun. Même pas les Lagarde & Michard (Je fais partie de la dernière fournée d’élèves à avoir étudié le nez dedans).

J’aime les livres.

J’aime le feu.

Je ne ferai jamais d’autodafé.

| On te propose de vivre éternellement dans un roman de ton choix, tu optes pour lequel ?

Mendiants & orgueilleux. Pour sa lumière…

| Quel est l’incunable que tu rêves de posséder, ton Saint Graal bibliophilique ?

Première édition italienne de Pinocchio (après sa parution en journaux) ?

Première édition en allemand des contes des frères Grimm ?

Première édition américaine de ??? voir réponses plus haut.

Ceci dit, je ne suis pas bibliophile. La ville où j’habite (Lyon) dispose d’un énorme réseau de bibliothèques municipales. Gros lecteur, j’use et abuse de ma carte d’abonné.

Je me méfie de toute bibliophilie (dans ma famille, sévissent toutes sortes de collectionnites aiguës). Les plus gros bibliophiles que j’ai croisés n’étaient pas les lecteurs qui m’ont le plus impressionné.

| Au bout d'une vie de lecture, et s'il n'en restait qu'un ?

Roman ? Moby Dick.

Autrement, le Zarathoustra de Nietzsche.