BOOKHOUSE BOY #17 / Fabien Thévenot, Le Feu Sacré
- lefeusacreeditions
- 23 déc. 2013
- 3 min de lecture

Un jour, Aurélien Lemant m'a dit :
« Tu devrais répondre à ton propre questionnaire, un jour ».
« Chiche ! », j'ai répondu.
Mais alors juste parce que — contrairement à Groucho Marx — je veux bien être membre d'un club qui m'accepterait comme membre.
| On trouve quoi comme nouvelle acquisition dans ta bibliothèque ?
Beaucoup de livres à déplacer les montagnes : “Marcher” de Henry David Thoreau, “Marcher, une philosophie” de Frédéric Gros. La ville et l'aliénation qu'elle induit me questionne énormément depuis un moment. C'est probablement la raison pour laquelle j'ai aussi acheté “Pur” d'Antoine Chainas, dont l'intrigue traite de la place qu'occupe l'urbanisme dans l'apartheid économique qu'on subit aujourd'hui.
Sinon, la réédition de “Poppermost” de Pacôme Thiellement, et quelques livres de poche chinés ici et là : “Justine” de Sade, “Rendez-vous secret” d'Abe Kōbō, “Le Roi du Monde” de René Guénon.
| Quel livre marquant as-tu découvert à adolescence et que tu possèdes toujours ?
“Demian” de Herman Hesse. Durant mon adolescence, j'ai très peu lu. En revanche, j'ai relu pas mal de fois le peu de livres qui me sont passés entre les mains. “Demian” a été pour moi un livre fondateur qui m'a permis de comprendre que ma propre découverte de la bizarrerie du monde n'avait rien de singulière, qu'elle était au contraire une expérience universelle.
| Sans égard pour sa qualité, lequel de tes livres possède la plus grande valeur sentimentale, et pourquoi ?
“Le Théâtre des Opérations” de Maurice G. Dantec, dans son édition NRF, avec ses dizaines de petits marques-pages et annotations. Si “Les Racines du Mal” est un livre qui m'a amené (tardivement) à la lecture, “Le Théâtre des Opérations” est le livre qui m'a rendu boulimique. Chaque page renvoyait à un livre, un auteur, une référence, c'est un ouvrage que j'ai trouvé extrêmement grisant à l'époque. D'ailleurs, je n'aurais peut-être pas créé ma maison d'édition si je ne l'avais pas ouvert.
| Tu prêterais lequel de tes livres à quelqu'un que tu voudrais séduire ?
“La Pesanteur et la Grâce” de Simone Weil. Non pas comme préambule à la promesse d'une vie trop chaste, mais comme un aperçu de mes préoccupations intérieures.
| Que trouve t-on comme livres “honteux” dans tes rayonnages ?
La biographie de Zara White (merci Séb, je sais que tu me lis) et deux livres de propagande signés Léon Zitrone vantant les mérites de l'URSS. Je suis en train de me constituer une petite “bibliothèque de la honte” depuis un certain moment. “Le Livre qui dit la Vérité” de Raël y occupe une place de choix.
| Quels livres as-tu hérité de tes proches ?
Quelques livres d'Isaac Asimov que mon frère avait laissé à la maison avant son départ et que j'ai récupéré il y a peu.
| Le livre que tu as le plus lu et relu ?
“L'Invention de Morel” d'Adolfo Bioy Casares. On parle souvent de “livre-monde” pour les énormes pavés, mais ce petit livre est pour moi la preuve qu'en quelques lignes, on peux poser une ambiance, un univers, un contexte. C'est un livre vers lequel je reviens souvent, aussi à cause des thèmes qu'il aborde : l'illusion, l'amour, la solitude. C'est le premier livre que j'ai lu en me disant “bordel, la littérature est donc capable de ça ?”.
| Le livre qui suscite en toi des envies d'autodafé ?
Je passe. Je ne m'étais pas rendu compte à quel point en la posant cette question pouvait être embarrassante à répondre…
| On te propose de vivre éternellement dans un roman de ton choix, tu optes pour lequel ?
Je ne choisirais pas un roman mais une autobio. Celle d'Eric Losfeld, “Endetté comme une mule” qui raconte l'époque où publier des livres était encore un risque, où la censure ne portait pas encore le masque hypocrite et lâche du principe de précaution. J'aurais aimé connaître cette époque où les éditeurs avaient des couilles, prenaient des risques, jouaient leur structure sur un coup de dés en publiant des titres qui risquaient le pilon.
| Quel est l’incunable que tu rêves de posséder, ton Saint Graal bibliophilique ?
La première édition de la bande dessinée de Guy Peeleart, “Pravda la survireuse” (dont on attends toujours le réédition).
| Au bout d'une vie de lecture, et s'il n'en restait qu'un ?
Peut-être “Le Démon” d'Hubert Selby Jr. Une grande et métaphysique expérience du vide. Un grand roman philosophique sans fond car sans réponses.








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