BOOKHOUSE BOY #12 / Alain Jugnon

A l'occasion de la sortie du premier numéro des Cahiers Artaud, j'ai soumis l'écrivain/philosophe Alain Jugnon — le directeur de rédaction / master of ceremony de l'ouvrage — au questionnaire des Bookhouse Boys. Au sommaire, moult textes inédits d'auteurs et artistes qui figurent en très bonne place dans mon panthéon personnel, tel Aurélien Lemant, Michel Surya, Charles Pennequin, Pacôme Thiellement, Bernard Noël, Anne Van Der Linden (et Alain Jugnon lui-même, il va sans dire !). Bref, une sélection fresh, fresh, so exciting to me.

| On trouve quoi comme nouvelle acquisition dans ta bibliothèque ?

On trouve toujours dans ma bibliothèque des livres que je viens de prendre en mains chez un libraire pour les emmener avec moi jusqu'à ma grande table de travail : récemment ce fut De la grammatologie de Jacques Derrida et Naissance littéraire du fascisme de Uri Eisenzweig.

| Quel livre marquant as-tu découvert à adolescence et que tu possèdes toujours?

J'ai découvert à 17 ans, comme quelque chose qui normalement ne devait pas exister, la biographie de Nietzsche de Daniel Halévy. Un livre de poche rouge.

| Sans égard pour sa qualité, lequel de tes livres possède la plus grande valeur sentimentale, et pourquoi ?

Certainement : La mort de L.F. Céline de Dominique de Roux parce sinon je n'aurais jamais osé désirer écrire des essais à propos des écrivains que j'aime. Un livre ne possède une valeur sentimentale pour moi que parce qu'il a toutes les qualités. Je ne suis plus sentimental.

| Tu prêterais lequel de tes livres à quelqu'un que tu voudrais séduire ?

Je prêterais L'éducation sentimentale de Flaubert. Un vieux livre de poche vaguement rose. Mon livre.

| Que trouve t-on comme livres “honteux” dans tes rayonnages ?

Il y a un livre dont il ne faut plus avoir honte dans ma bibliothèque : La philosophie dans le boudoir de Sade, c'est un livre d'école.

| Quels livres as-tu hérité de tes proches ?

Absolument aucun.

| Le livre que tu as le plus lu et relu ?

Sans faire le zouave : Ecce homo de Nietzsche.

| Le livre qui suscite en toi des envies d'autodafé ?

Un livre, une puanteur, acheté, lu, craché : Quand j'étais nietzschéen d'Alexandre Lacroix, directeur de Philosophie Magazine. Depuis lors, même envie d'autodafé pour le magazine.

| On te propose de vivre éternellement dans un roman de ton choix, tu optes pour lequel ?

L'éducation sentimentale de Flaubert. Là, j'y suis.

| Quel est l’incunable que tu rêves de posséder, ton Saint Graal bibliophilique ?

Ainsi parlait Zarathoustra de Nietzsche. Avec la couverture dessinée à la main par Nietzsche lui-même.

| Au bout d'une vie de lecture, et s'il n'en restait qu'un ?

Pour en finir avec le jugement de Dieu d'Antonin Artaud. Le seul livre que je suis capable d'emmener avec moi pour ne pas mourir.